Dès l’apéritif,
avec l’arrivée des premiers convives, l’agréable
soirée entre amis qu’espérait tant Tilda commence
à déraper inéluctablement. Pour Clarrie, chaque
petit rituel social se transforme en épreuve quasi insurmontable,
soulevant chez ses hôtes une incompréhension teintée
d’hostilité. De la traversée du tapis du salon qui
prend les proportions d’un désert liquide au choix laborieux
parmi les alcools, sa terreur enfantine la laisse vulnérable
face à la crème de la société londonienne.
Clarrie n’est manifestement
pas dans son assiette, quand arrive le moment de dîner. Chacun
s’efforce bien de sauver les apparences, mais l’étrange
personnalité de Clarrie agit comme un révélateur
de l’absurdité inhérente. Les mets savoureux qui
se succèdent sur la table élégamment dressée,
rythment de notes douces-amères le naufrage des conversations
mondaines, tandis que tous finissent par mettre les pieds dans le plat.
Anna Davis a participé
à l’élaboration du manifeste en dix points des «Nouveaux
Puritains», mouvement qui rassemble des auteurs comme Alex
Garland (La Plage, Tesseract), Nicholas Blincoe (Jello
Salad, The Dope Priest, Acid Casuals, Manchester Slingback, etc…),
et une douzaine d’autres jeunes écrivains anglo-saxons.
Par ce premier roman, elle illustre avec un humour acide les dogmes
de leur credo : «une littérature ancrée dans
le réel, dégagée de toute rhétorique, un
récit compris comme fragment d’une époque».
Stig Legrand 2002